Psychologie

Comment accepter de vieillir physiquement?

Comment accepter de vieillir physiquement?

  Photographe : Marie-Eve Tremblay / Colagene.com

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Comment accepter de vieillir physiquement?

Accepter les rides et les signes de l’âge est loin d’être évident. Comment poser un regard serein sur l’inéluctable passage du temps? Notre journaliste a réfléchi à la question et nous guide avec elle vers un peu plus de sagesse.

J’aimerais pouvoir dire que je suis zen. Que les années qui passent me glissent dessus comme l’eau sur le dos d’un canard. Eh bien non! J’ai 46 ans et, depuis deux ou trois ans, les années se digèrent un peu moins bien et laissent leurs traces avec un peu trop d’insistance.

Mes rides de plus en plus affirmées détonnent avec mon désir de plaire, d’être aimée. Non seulement avec ce désir, mais avec mon identité tout entière. La peur de vieillir n’a rien de superficiel. Elle vient nous chercher au plus profond de notre ADN. «De tout temps, le rôle des femmes a tourné autour de leur image, de leur capacité à attirer les hommes, à les séduire», dit Vivian Diller, psychologue et auteure du livre Face it: What Women Really Feel as Their Looks Change (Hay House, 2010). «Si on ne suscite plus le désir, alors que vaut-on? Qu’on l’admette ou non, cette relation entre notre image et notre valeur comme personne est très étroite.»

Plus de 20 millions de chirurgies esthétiques et d’interventions non chirurgicales ont été faites dans le monde en 2014, le Botox étant en tête de liste. Presque trois millions de plus qu’en 2009. Et les femmes sont les principales concernées (83%). Se faire injecter sous la peau une dose de jeunesse synthétique, Alexandra, 42 ans l’a déjà fait.«Dès que j’ai eu 30 ans, prévenir les marques du temps a été l’un de mes principaux objectifs, dit-elle. J’ai fait un peu de mannequinat plus jeune, alors j’ai commencé très tôt à me soucier de mon apparence, et même à me définir par rapport à celle-ci. Avoir 30 ans m’apparaissait comme un cauchemar. Tu imagines 40!»

«J'ai réalisé qu’à trop focaliser sur l’apparence, je risquais de passer à côté de la vie.»  Alexandra, 42 ans.

Vais-je plaire encore? Suis-je toujours sexy? Va-t-on continuer de m’aimer? Autant de questions que se posait régulièrement Alexandra. Des questions qui, je pense, ne viendraient pas spontanément à l’esprit d’une femme de 75 ans. Mais il y a comme une zone grise chez les femmes, une sorte d’entre-deux-âges où le rapport à l’apparence suscite souvent de l’incertitude. On se met à douter. De notre image. De notre capacité à allumer des feux. Comme si on avait peur de disparaître aux yeux des autres, des hommes, surtout.

«Entre 35 et 50 ans, la plupart des femmes ne trouvent vraiment pas évident de vieillir, constate la psychologue. Parce que, durant cette période, il se produit essentiellement deux choses: les signes de l’âge qui deviennent plus visibles, puis la périménopause, qui entraîne différents symptômes pas des plus agréables. Tout cela vient chambouler le regard qu’on pose sur soi et exige une adaptation, une redéfinition de soi.»

Récemment, Alexandra s’est offert le plus beau des cadeaux: elle a commencé à lâcher prise et à accepter que le temps s’inscrive naturellement sur son corps. «A-t-on le choix, de toute façon? À un moment donné, à trop vouloir essayer de camoufler les marques du temps, on produit l’effet contraire, dit-elle. Et puis, je garde en mémoire les mots d’une tante que j’aimais beaucoup, décédée il y a deux ans. Elle m’a dit, alors qu’elle était déjà malade, que ce qui allait lui manquer le plus de la vie, c’était... la vie. Ces mots ont fait leur chemin et m’ont fait réaliser qu’à trop focaliser sur l’apparence, je risquais de passer à côté de la vie.»

Et dans la vie, il y a les deuils qu’on doit faire. Comme celui de la jeunesse et de tout ce qu’elle représente pour nous. «Ce n’est pas évident, car la jeunesse est très valorisée, dit Alexandra. Et il est aussi difficile de ne pas être influencée par les standards de beauté.»«Il faut éviter d’avoir une image rigide de la beauté et s’ouvrir à une notion de beauté plus large et plus profonde, ajoute Vivian Diller. Et réaliser qu’on a la liberté de se définir de mille façons autres que notre apparence, comme notre intellect, notre sens de l’humour, les différents rôles qu’on endosse...»

Cesser de se comparer, de dénigrer notre physique, penser à toutes les femmes fortes, intelligentes et pleines de vie comme autant de revendications de la beauté multiple, diversifiée et unique à la fois. Car bien que l’industrie esthétique soit des plus prospère, un autre courant se dresse: celui du naturel, du «vrai». C’est ce que Vivian Diller perçoit de ses observations et de ses recherches. Selon elle, les gens sont de plus en plus critiques à l’égard de l’industrie de la beauté, l’éducation de nos enfants est de moins en moins sexiste et les femmes sont représentées dans la plupart des sphères de la société. «L’authenticité, comme valeur, prend de plus en plus le pas sur la jeunesse et la beauté à tout prix», assure-t-elle.

Je veux la croire. Quoi qu’il en soit, le temps ne s’arrêtera pas. Mes rides se multiplieront. Mais je vais travailler à percevoir la beauté qui s’y faufile et non le contraire. Après tout, le temps est trop précieux pour que je m’en fasse un ennemi.

Isabelle Bergeron est journaliste indépendante. Pour apprivoiser les années qui passent, elle se répète souvent cette phrase: Vieillir est une chance que plusieurs n’auront jamais.

 

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